ÉPREUVE D’ANALYSE D’UNE SITUATION PROFESSIONNELLE

OPTION LETTRES MODERNES

« LITTÉRATURE ET LANGUE FRANCAISES »

 

Rapport présenté par Fabienne Ouvrard

 

Le présent rapport a pour finalité, une année après la mise en place du concours rénové du CAPES/CAFEP de Lettres, de présenter et confirmer les enjeux de l’épreuve orale de Littérature et Langue Françaises à l’aune de cette seconde session. Il s’agit également de fournir aux futurs candidats des éléments utiles à leur préparation, au regard des exigences du jury. 

Ce rapport prendra ainsi appui sur les remarques, exemples et conseils avérés des différentes commissions[1]. Le propos s’appuiera aussi sur l’incontournable rapport fondateur de la session 2014[2] qui définit l’épreuve et souligne sa continuité avec l’ancienne Epreuve sur dossier.  En ce sens, la lecture des rapports de jury des années précédentes est toujours utile et conseillée. On pourra notamment se référer avec intérêt au rapport de la session 2012 qui, rappelant  les enjeux de l’ancienne épreuve d’admission, permet d’en mesurer la continuité avec l’épreuve actuelle de Littérature et Langue Françaises :

 […] L’épreuve sur dossier est symboliquement et effectivement le moment de passage entre le temps de la constitution de savoirs et le temps de leur mise en pratique « sur la crête qui sépare les deux versants du métier d’enseignant » […]. Propos qui trouvent résonance dans le rapport 2014, lequel tout en soulignant les différences entre les deux épreuves, met en évidence les points communs et notamment l’importance capitale des savoirs littéraires et culturels. 

Il s’agit ainsi, dans une perspective professionnalisante[3], de conjuguer maîtrise des connaissances, savoirs et compétences acquises et mise en œuvre pédagogique dans le cadre du métier envisagé.

Cette année, les commissions ont entendu des exposés de qualité très variée. Certains candidats ont pris en considération la nature explicitement plus littéraire d’une épreuve presque formative dans ses enjeux mêmes ainsi que la mise en œuvre qu’elle sous-tend. D’autres ont sous-estimé cette dimension nouvelle dans le rapport aux textes comme objectif didactique dominant. 

Ainsi, il s’agira de préciser les attentes du jury et de faire état des  principaux « défauts » persistants tout en apportant quelques recommandations.     

 

  1.         L’EPREUVE 

 

Quelques rappels utiles

 

Comme le précise le rapport fondateur de la session 2014 précité, l’épreuve qui dure une  heure en tout se divise en deux parties de trente minutes chacune. Lors de la préparation d’une durée de trois heures, le candidat dispose d’un dossier constitué de textes littéraires (entre trois et cinq en général) issus du patrimoine de la littérature, de ses origines à sa contemporanéité la plus récente, et de documents complémentaires (un ou deux), documents iconographiques et/ou textes critiques. 

Il appartient donc au candidat de consolider, d’actualiser, de nourrir sa culture littéraire en l’ouvrant aux phénomènes intertextuels, aux ancrages culturels et artistiques afin de permettre un dialogue entre les œuvres. 

 

Une année de consolidation

 

Cette seconde année de mise en œuvre a permis de consolider les fondations d’une épreuve nouvelle et d’en mieux définir les contours.                 

Force est de constater que les candidats sont, dans l’ensemble, mieux préparés et plus à l’aise avec les dossiers. On remarque notamment une meilleure maîtrise méthodologique ; les candidats savent, sauf exception, comment conduire l’exposé. Cependant, les membres du jury ont pu regretter encore trop souvent que le projet de séquence présenté, finalité de l’épreuve, consiste en une structure pédagogique ou didactique souvent bien creuse. Or l’épreuve invite, dans l’approche des textes et des documents soumis, à mettre en perspective savoirs littéraires et linguistiques dans le cadre d’un dispositif didactique. En effet, chaque libellé de sujet, en ses termes mêmes, appelle une lecture savante et active des textes dont la confrontation permet de saisir les enjeux du corpus, comme le souligne l’exemple suivant :  « Dans le cadre de l’enseignement du français en classe de Quatrième, et plus particulièrement de l’objet d’étude  « Théâtre : faire rire, émouvoir, faire pleurer », vous analyserez le corpus proposé.  Vous préciserez les modalités de son exploitation sous la forme d’un projet de séquence assorti du développement d’une séance de cours. Cette séquence comportera obligatoirement une séance d’étude de la langue. »

Un tel libellé suppose que le candidat soit capable, dans le cadre de son analyse, d’une articulation constante et habile des attentes propres à l’objet d’étude visé (le théâtre et ses registres), avec sa place dans les programmes (entre la comédie en Cinquième  et la continuité et le renouvellement du genre en Troisième) et sa mise en œuvre en classe (Quand ? Pourquoi ? Comment ? ).

 

Une épreuve littéraire et didactique 

 

In fine, l’épreuve d’analyse d’une situation professionnelle permet au candidat de faire montre de compétences de lecture littéraire, de compétences d’analyse textuelle dans la perspective d’une transposition en classe au sein d’un projet  de séquence pédagogique. Rappelons que la notion de «séquence pédagogique» se définit comme un ensemble de séances articulées entre elles dans le temps, ayant une unité, des objectifs clairement définis qu’il s’agit d’atteindre par des moyens divers. 

Il apparaît ainsi essentiel que le candidat maîtrise et apprécie, dans le cadre d’une réflexion didactique en gestation, les notions utiles à la construction des savoirs des élèves,  et pour ce faire de les définir justement, en étroite articulation avec les programmes du collège et du lycée dont la connaissance  s’avère indispensable[4]

 

Premiers constats  

 

Comme nous l’avons souligné ci-dessus, les candidats sont cette année mieux préparés à l’épreuve. Non seulement la démarche est mieux maîtrisée mais encore certains candidats, particulièrement prêts, ont été capables de très bonnes prestations, proposant tout autant une  analyse juste et fine du corpus, qu’une approche didactique pertinente et justifiée, servie par une problématique adaptée. Ces candidats possèdent les savoirs attendus, osent se battre avec les textes, maîtrisent la langue française comme objet d’apprentissage et moyen de communiquer. On a ainsi pu assister à des performances remarquables, ayant obtenu la note maximale, sans indulgence ni bienveillance du jury, mais grâce à de réelles compétences et qualités. 

Le  bilan de la session montre toutefois que l’exploitation sous la forme d’un « projet de séquence », au cœur du libellé des sujets (il faut en effet concevoir un projet), a donné lieu à des interprétations extrêmement variées avec trois tendances très préjudiciables : la séquence « coquille vide » où le candidat donne l’habillage sans questionner les textes,  la séquence purement formaliste, parfois jargonnante (« je narrant »/  « je narré ») où le vocabulaire employé n’est pas toujours maîtrisé, ou encore des séquences « tout pédagogique », plus que didactiques, où le futur enseignant minute le travail des élèves et les modalités (travail en îlots, au CDI…) sans jamais définir, à la lumière des textes donnés à lire, d’objectifs d’apprentissage et de compétences à construire du côté des élèves.  

 

Ainsi, le jury a pu déplorer que certains exposés se contentent de commentaires globaux, généralistes autour des textes souvent paraphrasés, que d’autres proposent des formats de séquences inappropriés juxtaposant des approches comparatistes des textes en négligeant les élèves, la progression des apprentissages, les activités pratiques, soit tout le versant didactique de l’épreuve. 

Nous insistons donc sur le fait que des compétences de lecteur de textes littéraires sont ici évaluées dans le cadre d’un concours de recrutement de professeurs de Lettres censés avoir un niveau de maîtrise assuré du champ littéraire qu’ils ont choisi pour en faire leur métier, donc  pour enseigner la littérature. 

 

De l’exposé à l’entretien

 

Les deux parties constitutives de l’épreuve, d’une durée de trente minutes chacune, n’ont pas la même finalité. 

L’exposé, sans aucune intervention de la commission, consiste à rendre compte de la lecture  analytique du corpus (textes et documents), à travers le prisme d’un projet de séquence répondant à une problématique. 

Le jury attend avant tout une exploration conséquente des textes - et non un rapide survol- qui met au jour l’intérêt du corpus (quelle en est l’unité ? thématique, générique, formelle… ?) et propose un projet cohérent, sans être exhaustif, au service d’apprentissages définis. L’exploration substantielle des textes ne se départit bien entendu pas de la démonstration  attendue de leur compréhension et de l’interprétation qui peut en être donnée. 

La présentation du dossier, indispensable, ne doit pas se substituer à la proposition didactique et inversement la proposition didactique ne peut se passer de la présentation des textes et documents. Elle ne doit pas non plus se réduire à une simple énumération (texte 1, texte 2, texte 3…) ou description des supports. Bon sens et mesure appellent une présentation rigoureuse et équilibrée du dossier qui mette en avant ses spécificités ainsi que la littérarité des textes et envisage le cas échéant sa mise en contexte, sans pour autant digresser vers des considérations hors champ issues de la consultation des dictionnaires en salle de préparation !

En ce qui concerne la problématique, le rapport 2014, soulignait qu’il s’agit de « formuler une problématique littéraire ».  Il est donc inutile, comme cela a été encore trop souvent le cas, de formuler une double problématique, « littéraire et didactique », qui n’a pas de raison d’être, la littérature constituant la substance même des enjeux didactiques. Il n’est pas non plus très pertinent de décliner une multiplicité de questions dans lesquelles on se perd. La simplicité, la  clarté et la pertinence d’une question suffisent à son efficience. La problématique suivante posée pour un dossier théâtre en Troisième : « Comment le dramaturge montre-t-il les limites communicationnelles du langage et lui attribue-t-il d’autres fonctions ? » a ainsi entraîné l’adhésion du jury. Rappelons que ce dernier attend une problématique en lien avec le niveau d’enseignement visé et l’objet d’étude du programme. Il va sans dire que la problématique, si séduisante soit elle, ne peut suffire et que le retour constant sur les textes, attestant une lecture juste et sensible, doit y être articulé.

On évitera donc toute glose qui conviendrait à n’importe quel objet d’étude sans justement rendre compte de la singularité du dossier composé et on privilégiera une présentation s’inscrivant dans un mouvement dynamique allant d’une vision synthétique à une exploration  plus analytique.

          Ces différents éléments conjugués constituent bien  le projet de séquence attendu. 

 

Un entretien ouvert où le candidat se révèle

 

L’entretien, qui suit la phase de délibération du jury à l’issue de la première partie, a une tout autre finalité et vise à évaluer d’autres compétences. Le rapport 2014 met en avant sa dimension dialogique, laquelle permet notamment d’apprécier la capacité du candidat à écouter, à entendre, à réagir, à revenir sur ses choix, les justifier, à communiquer mais qui lui permet aussi de se révéler. Le jury a pu ainsi assister à des exposés courts et médiocres qui ont été suivis d’entretiens où le candidat a excellé, révélant une grande finesse assortie à une très bonne culture littéraire et de solides connaissances culturelles. Cette partie particulièrement réussie a parfois « sauvé » des candidats en péril.  

À l’entière appréciation du jury, l’entretien peut se dérouler de différentes façons. Cependant, cette année encore, il a la plupart du temps débuté par un moment de reprise sur l’exposé avec prioritairement un retour sur les textes  peu ou pas présentés, juste survolés ou ayant fait l’objet d’un contresens. Tous les membres du jury s’accordent sur l’importance de ce retour permettant d’évaluer des compétences de lecture, mais aussi le degré de sensibilité littéraire et esthétique des futurs professeurs, leurs connaissances, tant littéraires et linguistiques, que culturelles et artistiques. Tout en tenant compte de leur inexpérience, l’entretien apprécie également la réflexion didactique et pédagogique des candidats à partir de la mise en œuvre qu’ils proposent et des choix qu’ils effectuent. On a ainsi pu revenir sur la cohérence de la séquence, sa place dans le projet pédagogique annuel, le choix des textes, l’ordre de lecture, les activités proposées, les modalités de lecture, les évaluations envisagées ou parfois oubliées. Le jury a pu également proposer d’améliorer « ensemble » la proposition initiale, donnant ainsi une occasion supplémentaire au candidat d’engager sa réflexion didactique et de la développer plus avant.  

 

De l’ouverture culturelle et artistique…

 

Le jury a cette année encore poursuivi l’entretien par des questions culturelles et artistiques permettant, à partir du dossier fourni, d’élargir et d’approfondir la réflexion du candidat. Au vu de la part qui lui est attribuée, tant dans les programmes du collège que du lycée, l’Histoire des Arts a largement été convoquée par le biais de questions diverses. Autant que faire se peut, en lien avec la problématique ou, plus souvent encore, au regard des documents iconographiques accompagnant les textes, les candidats ont ainsi été conduits à montrer leur culture personnelle, notamment artistique,  et leur sensibilité esthétique, parties intégrantes de l’enseignement des Lettres. La bibliothèque intérieure des candidats a parfois été sollicitée, et notamment la part de lecture de littérature contemporaine, préconisée dans les programmes du collège et du lycée. 

 

… à l’ouverture professionnelle et déontologique

 

Comme y invite l’arrêté du 19 avril 2013 paru au Journal Officiel du 27 avril 2013[5] définissant l’épreuve, l’entretien comprend une phase d’ouverture professionnelle :

« Au cours de l’entretien qui suit l’exposé du candidat, la perspective d’analyse de situation professionnelle définie par l’épreuve est élargie à la capacité du candidat à prendre en compte les acquis et les besoins des élèves, à se représenter la diversité des conditions d’exercice de son métier futur, à en connaître de façon réfléchie le contexte dans ses différentes dimensions (classe, équipe éducative, établissement, institution scolaire, société), et les valeurs qui le portent dont celles de la République. »

Le jury a ainsi interrogé  les candidats sur leur futur champ professionnel à travers des questions très diverses, parfois générales : « Le chef d’établissement a-t-il un droit de regard sur vos pratiques pédagogiques ? » ; « Qu’est-ce que le socle commun de connaissances, de compétences et de culture ? »  « Comment définir la laïcité ? » ;  plus concrètes : « Dans quelle mesure le professeur de Lettres peut-il contribuer à la mise en place de la Charte de la laïcité ? » ; « Que pensez-vous des classes sans notes ? » ou encore plus pragmatiques : « Des parents vous reprochent le choix des textes que vous faites lire en classe, quels arguments apportez-vous ? » ; « Vous apprenez qu’un de vos élèves est victime de harcèlement, que faites-vous ? ». Comme on peut le constater, les candidats ont pu être questionnés sur des domaines très divers : les valeurs républicaines, la vie scolaire, la connaissance du fonctionnement du système éducatif, d’un établissement scolaire, le rôle et la place du professeur, l’orientation de l’élève etc. Dans ce temps de l’entretien, les membres des commissions ont constaté des méconnaissances rédhibitoires, concernant notamment la laïcité, principe constitutif de l’école de la République, devenue une sorte de fourre-tout, à savoir « la volonté de l’Education nationale d’offrir une culture à tous », ou encore « la neutralité sur tout type de sujet ». On ne peut que conseiller aux futurs candidats de lire la charte[6] qui explicite le sens et les enjeux du principe de laïcité en quinze articles et de revoir les valeurs de la République mais aussi l’enseignement du fait religieux dans les programmes, éléments essentiels de la culture générale attendue chez un enseignant. Rappelons que ces questions valent pour tout type d’établissement, dans le cadre de l’enseignement du français.  

L’ouverture professionnelle et déontologique vise avant tout à éprouver le bon sens des candidats, à apprécier leur capacité à se projeter dans l’exercice de leur métier, et à mesurer leur aptitude à agir ou réagir, en tant que futur enseignant, de façon éthique et responsable. Le rapport de la « session exceptionnelle » sur l’ancienne épreuve  Agir en fonctionnaire de l’État et de façon éthique et responsable,[7] reste en ce sens une lecture éclairante et utile.   

  

 

 

  1.       LES DOSSIERS PROPOSÉS LORS DE LA SESSION 

 

La session 2015 a offert un large éventail de dossiers, brassant tous les genres et tous les niveaux, du collège et du lycée d’enseignement général (à l’exception de la Terminale L). La diversité des corpus, leurs contrastes, leurs nuances donnent à l’épreuve toute sa force littéraire et tout son intérêt. Pas de « dossier type » mais des compositions variées, tant dans le choix des supports que dans leur présentation (souvent chronologique) ou leur nombre. 

Les libellés des sujets portent sur un objet d’étude et un niveau d’enseignement ; il faut donc connaître parfaitement les programmes pour traiter le sujet ! Les programmes du collège sont chronologiques, ce qui implique une réflexion sur la progressivité des apprentissages, notamment concernant la connaissance des genres littéraires, mais aussi en matière d’étude de la langue. Il est également indispensable de situer les textes et les œuvres dans l’histoire littéraire pour analyser avec justesse et pertinence le corpus donné. 

Le rapport 2014 a fourni un panel conséquent de sujets et reproduit les bordereaux tels qu’ils ont été soumis aux candidats. Nous ne donnerons donc ici que quelques exemples visant à souligner les multiples et riches possibilités offertes par la constitution même des dossiers, explicitement littéraires. 

 

Au niveau du collège : 

 

Le programme de français des classes du collège invite à la lecture de textes variés, des textes  fondateurs à des textes contemporains, inscrivant la littérature dans l’histoire sociale et politique  en posant les jalons d’une réelle culture humaniste commune. On a ainsi pu rencontrer des dossiers mettant en regard des textes issus de l’Iliade ou de l’Odyssée, des Métamorphoses d’Ovide, des passages de la Bible, des sourates du Coran, des extraits de contes d’origine diverse, des scènes de théâtre, d’illustres fables, des épisodes de romans chevaleresques ou d’aventures, mais aussi des poèmes, en prose, en vers libres, à forme fixe ou déconstruits, ou encore des passages de célèbres romans classiques ou plus contemporains, de lettres intimes ou engagées. La réflexion sur la littérature, la lecture d’une œuvre littéraire, l’évolution d’une forme, d’un genre, d’une écriture,  président à la composition des dossiers, cette année encore variés et riches.   

 

 

 

Quelques exemples :

 

 

 

Niveau 6ème : objet d’étude: « Textes de l’antiquité » Textes :

-                  Homère, L’Odyssée, extrait,  VIIIème s. av. JC, traduction de B. Rémy d’après Leconte de Lisle, 1988

-                  Virgile, L’Énéide, extrait, Ier s. av. JC, traduction de P. Monat d’après D. Nisard, 1988

-                  Ovide, Les Métamorphoses, extrait, Ier s. ap. JC,  traduction J. Chamonard, 2000

Documents complémentaires :   Trois représentations de Sirènes

-                  Ulysse et les Sirènes, IIIème s. après JC

-                  Sirène, J.W Waterhouse, 1901

-                  La Petite Sirène, E. Eriksen, 1913

 

 

 

 

Niveau 6ème : objet d’étude: « Contes et récits merveilleux  » Textes :

-                  Charles Perrault, « Les fées », in Contes de ma mère l’Oye, 1697

-                  Pierre Gripari, « La fée du robinet » in la Sorcière de la rue Mouffetard et autres contes de la rue Broca, 1967

-                  « Les deux sœurs », in Jean Muzi, Contes des rives du Niger, 1986 Documents complémentaires :   

-                  Le Petit Chaperon Rouge, illustration de Jessie Willcox Smith, 1911

-                  Tex Avery, Red Hot Riding Hood, 1943

 

 

 

 

Niveau 5ème : objet d’étude : « Le récit d’aventures » Textes :

-                  Marco Polo, Le Livre des merveilles du monde, extrait, 1298

-                  Jules, Verne, L’Ile mystérieuse, extrait,  1874

-                  Jack London, Bâtir un feu, extrait, 1907

-                  Michel Tournier, Vendredi ou la vie sauvage, extrait, 1971 Document complémentaire :

-                  John Berkeley, Des vents favorables, huile sur toile, XXème siècle-

 

 

 

Niveau 5ème : objet d’étude : « Théâtre : la comédie » Textes :

-                  La Farce du cuvier, XVème siècle, scène 4

-                  Molière, La Jalousie du Barbouille, scènes 4 et 5, vers 1600

-                  Molière, Les Fourberies de Scapin, acte III, scène 2, 1671

-                  Jean Anouilh, Le Bal des voleurs, Pièces roses, 1938 Document complémentaire :

-                  Peter Jansz Quast, 1605-1647, Farceurs dansant

 

 

 

Niveau 4ème : objet d’étude : « Poésie : le lyrisme »  Textes :

-                  Victor Hugo, Les Feuilles d’automne, 1831

-                  Charles Baudelaire,  « Recueillement », Les Fleurs du mal, 1861

-                  Guillaume Apollinaire, « Le Pont Mirabeau », Alcools, 1912 - Henri Michaux, « Repos dans le malheur », Plume, 1938 Document complémentaire :

-                  Edvard Munch, Le cri, huile sur toile, Galerie nationale d’Oslo, Musée Munch, 1893

 

 

 

 

 

Niveau 4ème : objet d’étude : « La lettre »  Textes :

-                  Montesquieu, Les Lettres persanes, lettre XCIX, 1721

-                  Madame de Sévigné, Correspondance, 1725

-                  George Sand, Correspondance, tome V, avril 1840-décembre 1842

-                  Emile Zola, article « J’accuse », L’Aurore, 13 janvier 1898 Document complémentaire :

-                  Illustration de la « Lettre d’Emile Zola », Léon Hayard, 1898

 

 

 

 

Niveau 3ème : objet d’étude : « Le théâtre : continuité et renouvellement » Textes :

-                  Sénèque, Médée, vers 910-953, Ier siècle

-                  Pierre Corneille, Médée, acte V, scène 6, 1635

-                  Jean Anouilh, Médée, 1953

-                  Max Rouquette, Médée, scène 9, 2003 Documents complémentaires :

-                  Pierre Corneille, Discours sur l’utilité des parties du poème dramatique, 1660

-                  Médée de Max Rouquette, mise en scène de Jean-Louis Martinelli, Théâtre de Nanterre-

Amandiers, Odile Sankara dans le rôle de Médée, 2009

 

 

 

 

Niveau 3ème : objet d’étude : « La poésie dans le monde et dans le siècle : la poésie engagée » Textes :

-                  Robert Desnos, « Ce cœur qui haïssait la guerre », in Destinée arbitraire, 1943, publication posthume 1975

-                  Louis Aragon, « Strophes pour se souvenir », Le Roman inachevé, 1955

-                  Paul Eluard, « Liberté, 1942, in Au rendez-vous allemand, 1945 - Primo Lévi, Si c’est un homme, 1947 Documents complémentaires :

-                  Putain de guerre (années 1914-1916) Tardy et Verney, 2008 

-                  Pablo Picasso, La Guerre et la paix, huile sur bois, musée national Picasso, 1952

 

 

 

 

Au niveau du lycée : 

 

Les programmes de français et littérature du lycée[8] ont notamment pour finalités « la constitution et l’enrichissement d’une culture littéraire ouverte », « la construction progressive de repères permettant une mise en perspective historique des œuvres littéraires », « le développement d’une conscience esthétique », mais aussi « la formation du jugement et de l’esprit critique ». Les objets d’étude de chaque niveau invitent ainsi à des lectures permettant d’élargir et de structurer la culture littéraire, d’établir des liens avec d’autres formes d’expression dans le cadre de l’Histoire des Arts, et avec les Langues et Cultures de l’Antiquité, à travers des textes d’époques et de genres différents. La littérature d’idées y prend une place conséquente ; les dossiers sélectionnés montrent l’évolution des corpus proposés entre le collège et le lycée, tout en soulignant la continuité de l’un à l’autre.

 

Niveau 2nde : objet d’étude : « Genres et formes de l’argumentation : XVIIe et XVIIIe siècles » Textes : 

-                  Cyrano de Bergerac, L’Autre monde ou les États et Empires de la Lune, extrait, 1657 

-                  Cyrano de Bergerac, États et empires du Soleil, extrait, 1662

-                  Théophile de Viau, Œuvres poétiques, « Satire première », 1627 - Théophile de Viau, Œuvres poétiques, Sonnet XIX, 1627 Documents  complémentaires :

-                  Aelbert van der Schoor, Vanité, huile sur canevas, 1660, Rijskmuseum, Amsterdam - Dictionnaire mondial des littératures, Larousse, 2002, article «  libertins du XVII ème siècle », extrait

 

Niveau 2nde : objet d’étude: « La poésie du XIXè au XXè siècle : du romantisme au surréalisme »  Textes : 

-                  Théodore de Banville, « La corde roide », Odes funambulesques, 1857

-                  Stéphane Mallarmé, « Le Pitre châtié », Poésies, 1887

-                  Guillaume Apollinaire, « Crépuscule », Alcools, 1913

-                  Pierre Reverdy, « Saltimbanques », Poèmes en prose, 1915, in Plupart du temps, 1915-1922  Document  complémentaire:

-                  Pablo Picasso, Famille de saltimbanques, National Gallery of Art, Washington D.C, 1905

 

Niveau 1ère : objet d’étude : « Le personnage de roman, du XVIIème siècle à nos jours »  Textes :

-                  Paul Scarron, Le Roman comique,  extrait, 1651-1657 

-                  Madame de La Fayette, La Princesse de Clèves, extrait, 1678

-                  Honoré de Balzac, Eugénie Grandet, extrait, 1833 

-                  Alain Robbe-Grillet, La Jalousie, extrait, 1957 Documents complémentaires :

-                  Alain Robbe-Grillet, Pour un nouveau roman, extrait, 1963

-                  Sylvie Germain, Les Personnages, extrait, 2004 

 

Niveau 1ère : objet d’étude : « La question de l’Homme dans les genres de l’argumentation du XVIè à nos jours » Textes

-                  Jean-Jacques Rousseau, Emile ou de l’Education,  extrait, 1762

-                  Paul Nizan, Aden Arabie, extrait, 1931

-                  Antoine de Saint-Exupéry, Terre des hommes, extrait, 1939  Documents complémentaires :

-                  Paul Gauguin, D’où venons-nous ? Que sommes-nous ? Où allons-nous ? 1897 - Alain, Propos sur le bonheur, 1828

 

 

Quelques commentaires sur les prestations

 

On a pu assister à des prestations très inégales, plus ou moins réussies selon le niveau de lecture personnelle des textes, la force d’analyse et la sensibilité aux effets produits, les connaissances  et leur utilisation par les candidats. Les membres du jury ont ainsi été sensibles à de réelles entrées dans les textes, à un questionnement fin sur leur sens profond et singulier au détriment de plaquages généraux valables pour n’importe quel texte, de juxtapositions d’outils et de remarques formelles ou encore de vérités non démontrées du type : « Tous les poèmes ont une visée métapoétique ».

L’effort de problématisation du corpus, le souci constant de mise en perspective des textes et des documents, la justification de l’approche faite  démontrent la capacité de réflexion  littéraire. 

  Parmi les dossiers les plus discriminants, ceux portant sur la poésie, jugée très souvent difficile, impénétrable voire hermétique, mais aussi plus méconnue car moins lue, ainsi que sur le théâtre et l’argumentation, ont particulièrement mis les candidats en difficulté. Pour preuve, le dossier donné plus en haut en exemple et portant sur la poésie en Seconde : « Du romantisme au surréalisme »  a donné lieu à trois prestations très différentes, dont deux « mauvaises » ont d’emblée écarté le poème de Mallarmé, tout en se risquant peu à entrer dans les autres poèmes. Le document complémentaire, une œuvre précubiste de Picasso, pas forcément caractéristique des connaissances des candidats, n’a pas fait l’objet d’une analyse intéressante. Ce type de dossier a, à tort, mené à des conduites d’évitement des textes dans la construction d’une séquence « vide ». 

Inversement, les dossiers présentant des textes connus,  spécifiquement de genre narratif, ont favorisé des entrées plus franches et un engagement plus marqué des candidats, accompagnés d’efforts de problématisation et de mise en œuvre plus convaincants.  

 

  1.      BILAN DE LA SESSION ET ATTENTES DU JURY 

 

D’une session à l’autre : un bilan contrasté

 

L’impact des sujets sur les exposés s’avère, cette année encore, un paramètre important. Force est de constater que les candidats sont déroutés par des sujets sur la poésie : le poème en prose reste  encore trop méconnu, ses contours demeurent flous et les candidats ne parviennent pas toujours à distinguer prose poétique et poème en prose ; le poème en vers libres est rarement identifié comme tel, la poésie contemporaine postérieure au XXème est souvent ignorée (Yves Bonnefoy, Jacques Réda par exemple). Est-ce à dire qu’un futur enseignant de Lettres n’est pas en mesure d’apprécier ce genre ? On ne peut, cela va sans dire, qu’inciter les candidats à aller à la rencontre de ces œuvres jugées inaccessibles et à l’encontre de leurs propres préjugés. Comment en effet devenir « passeur de textes » si on n’investit pas soi-même la littérature dans toute sa diversité et ses richesses ?

Les dossiers portant sur le genre de l’argumentation, et convoquant singulièrement la littérature d’idées, à travers des textes à résonance plus engagée, des textes philosophiques du XVIIIème, des articles critiques, des extraits d’essais, ont également souvent posé difficulté aux candidats. La lecture de ces textes (de moralistes du XVIIème, de philosophes du XVIIIème, d’intellectuels plus contemporains) implique en effet la plupart du temps la connaissance assez précise d’un contexte historique, politique, social et culturel. Comprendre l’inscription référentielle d’un texte dans ces contextes, sans être une condition suffisante à son analyse, demeure un éclairage important  permettant de comprendre la genèse des œuvres, et la tension perpétuelle qui les anime, entre rupture et continuité.  

Le manque parfois surprenant de connaissances de base et de repères en matière d’histoire littéraire : méconnaissance des mouvements littéraires et culturels majeurs (classicisme, romantisme, surréalisme..) avec parfois de grossières erreurs, auteurs méconnus, absence de lectures attendues, confusion et ignorance de notions clés, notamment narratologiques, linguistiques et stylistiques, a souvent frappé le jury. On a pu aussi être surpris par l’absence de recul des candidats à l’égard de leurs propres savoirs : une description de Balzac est-elle nécessairement strictement « réaliste » ou marquée par la théorie de la « physiognomonie » ; Zola peut-il se réduire à l’observation scientifique du milieu de son époque ? Est-il bon de rappeler la singularité du texte littéraire, son unicité, comme seules vraies raisons de désirer l’approcher, l’explorer, l’interpréter et le savourer ?

 

  Un certain nombre de défauts rédhibitoires et récurrents ont ainsi été soulignés par tous les membres des commissions lors de la session :

 

o   La gestion du temps : sur les trente minutes imparties à l’exposé, les candidats ont souvent présenté des exposés de moins de vingt minutes. Non que la durée soit un gage de qualité et un critère de réussite, mais il semble que l’épreuve, dans ses exigences propres (introduction/présentation/caractérisation ; problématisation du dossier ; projet de séquence incluant séance développée et séance de langue ; conclusion), nécessite a minima vingt minutes. En outre, on a particulièrement entendu lors de cette session des exposés totalement déséquilibrés dans leur structure, fondés sur des introductions fleuves dans lesquelles la présentation à rallonge des textes, parfois résumés et/ou racontés, la  « sur-problématisation » du dossier, se sont souvent substituées à une réelle analyse des documents et ont donné lieu à des projets de séquence réduits à une peau de chagrin.

o   L’évitement des textes par une vaine surenchère didactico-pédagogique n’a pas trompé le jury sur le fait que les textes n’ont pas toujours été lus et deviennent alors un prétexte à déverser des connaissances plaquées et inadaptées au sujet.  oLe manque de connaissances qui s’est souvent révélé pendant l’entretien. Paradoxalement, par exemple, les lectures cursives en prolongement de la séquence se sont parfois avérées inconnues des candidats (exemple : suggérer de faire lire aux élèves un roman de Zola et avouer au jury n’y être jamais arrivé soi-même !).  

o   Des connaissances mal utilisées, notamment des idées reçues sur un auteur ou une œuvre, qui ne correspondent pas à l’extrait proposé (exemple : tout poème d’Aragon est nécessairement surréaliste et tout passage de Molière est comique).

o   Les contresens dus à une lecture trop rapide et superficielle, sans réelle réflexion sur les  textes. 

o   La prise en compte insuffisante ou inappropriée des documents complémentaires, traités à côté des textes, rarement intégrés réellement au projet.  

o   L’absence/oubli de la séance de langue et/ou de la séance développée.  oLe développement exclusif de la séance développée : on ne peut réduire l’étude des textes au seul énoncé d’un objectif ! Trop nombreux ont été les exposés qui n’ont en effet pas présenté suffisamment l’ensemble des textes du corpus. oL’absence de véritable « séquence » didactique : dès lors que l’analyse des textes n’a pas été suffisante et n’a pu donner lieu à la présentation d’axes de lecture, le candidat n’a pu construire de parcours donc n’a pas visé d’apprentissages précis ni prévu d’évaluation.    

o   L’emploi souvent non maîtrisé et inadapté d’une terminologie visant à éblouir le jury, qui donne lieu à des exposés verbeux dont rien de précis ne ressort.   

 

Dans quel sens aller ?

 

Les attentes du jury ont pour dénominateur commun la question essentielle du sens, mot  dont la langue française décline à l’envi les acceptions linguistiques et littéraires : signification, signifié, sémantique, dénoté/connoté, propre/ figuré, explicite/ implicite, symbolique etc. Ici, le sens renvoie  simplement et clairement au contenu donné à entendre à des experts professionnels par des experts en devenir. Aussi les exigences attendues ont-elles toutes partie liée avec la signification des œuvres offertes à la lecture et soumises à la sagacité de candidats, lecteurs de textes littéraires qu’ils analysent dans une perspective de transmission. La littérature parle de, permet de lire le monde, de le décrypter, de lui donner du sens. Enseigner, c’est certainement avant tout donner du sens à ce qu’on enseigne. 

 

Sens et bon sens à l’épreuve : « Sens sans bon sens n’est que ruine de l’âme » pourrait-on écrire pour parodier Rabelais. En effet, l’épreuve exige de la cohérence et le jury attend que l’exposé s’inscrive dans cette approche, conduisant à percevoir l’unité de sens de la prestation. De la même manière, l’entretien ne vise pas à poser des questions pièges ou à déstabiliser, mais plutôt à évaluer  notamment le bon sens des candidats à travers leur capacité à réagir et à réfléchir. 

 

Aller dans le bon sens: le mouvement semble s’imposer de lui-même, des savoirs maîtrisés à leur transposition didactique, dans la mesure où il s’agit de transmettre à des élèves des contenus (savoirs divers) au service de compétences à construire. Les savoirs scientifiques (qu’ils soient littéraires, linguistiques ou culturels) président à leur transmission et donc leur maîtrise  assurée est attendue en lieu et place de connaissances approximatives et confuses.

 

Le sens de la séance développée : si l’on file la métaphore du sens, on peut commencer par lever l’implicite concernant la séance dite « développée ». On s’accordera pour dire que développer ne peut rimer avec bâcler, et que la séance développée doit proposer une étude relativement poussée du texte support qu’elle exploite. La séance développée est donc à détailler, déployer, dérouler de manière substantielle (ce qui ne doit pas forcément prendre la forme d’une lecture analytique structurée, comme on le ferait en classe, mais doit s’appuyer sur les fondements de celle-ci, en dégageant les principaux intérêts du texte au regard de l’objet d’étude). Une séance durant une ou deux heures en général, on s’attend avant tout à la définition des objectifs d’apprentissage (notionnels, littéraires…) en regard à la spécificité du texte choisi et analysé (et éventuellement du document complémentaire), aux principales étapes et pistes d’analyse proposées, ainsi qu’à la place justifiée de la séance dans le projet de séquence. Ce n’est donc qu’à partir de ses partis pris didactiques que le candidat envisagera ses choix de mise en œuvre pédagogique, donc les moyens envisagés pour atteindre les objectifs visés. Rappelons que la séance développée ne demande pas la lecture  à haute voix du texte,  et n’est pas nécessairement une séance de lecture analytique. 

 

Le sens de la  séance de langue : un état parfois insensé.

La place de la séance de langue continue d’interroger. On se rapportera au rapport fondateur de 2014 [9] qui en rappelle les enjeux. Faut-il éviter de confondre la séance développée avec la séance de langue ? En fait, cela dépend du texte, des objectifs, des compétences visées. On ne peut dans tous les cas que conseiller la mise en œuvre d’une approche systémique de la langue, et donc une séance conçue en contexte, au service de la construction du sens du texte et/ou de compétences d’écriture précises. Mieux vaut alors une séance de langue à part entière, autrement dit pas simplement esquissée ou plaquée, mais avant tout signifiante car articulée précisément aux textes (un ou plusieurs) à leurs enjeux et permettant de construire tels savoirs et telles compétences chez l’élève. On évitera donc la séance de langue pour elle-même, même si la notion étudiée est bien inscrite dans les programmes. Le bon sens sera encore le maître-mot dans les choix effectués. Il est par exemple judicieux, comme l’a justement proposé un candidat,  de travailler  notamment sur les marques du dialogue dans une fable en Sixième. Notons que cette année le jury pourrait décerner la palme à l’adjectif, qui a remporté un vif succès dans les dossiers niveau collège. Cependant, le traitement de la notion n’a pas toujours été adapté au texte choisi et demeure encore mal maîtrisé (confusion fréquente entre apposition et épithète détachée). On ne peut certes attendre du candidat au concours une idée précise de progression en langue dans le projet pédagogique, toutefois peut-on espérer une séance qui vise des compétences en étude de la langue inscrites dans les programmes du niveau donné et reliées au texte sélectionné et donc à sa spécificité générique et stylistique (le jury a trop souvent entendu des points de langue sans aucun rapport avec la construction du sens des textes et leur écriture). On peut néanmoins s’attendre, dans le cadre des apprentissages visés, à un lien explicite avec l’évaluation (particulièrement sur les classes d’examen de Troisième et Première), notamment pour réinvestir les acquis. Sur les dossiers niveau lycée, les candidats, ont largement investi la grammaire de texte et de l’énonciation, avec plus ou moins de réussite. Enfin, cela va sans dire, la séance de langue suppose bien entendu la maîtrise de la notion choisie.  

 

De l’usage pertinent des documents complémentaires

Les (ou le) documents complémentaires associés au dossier ne constituent pas « la cerise sur le gâteau » mais sont constitutifs du corpus et participent de sa coloration même. Ils ne peuvent donc être réduits à une fonction « illustrative » comme cela a souvent été le cas, ni être « utilisés », in extremis, en fin de projet, en simple « lecture d’image », ni a fortiori écartés. La nature des documents : textes critiques, textes théoriques, illustrations diverses, tableaux, gravures, photographies, photogrammes de films, captations de mises en scènes… est à prendre en compte et traduit la richesse de l’ouverture culturelle dans les multiples possibilités d’éclairage du corpus qu’elle induit,  à la croisée des arts. La présence quasi systématique d’un document iconographique dans les dossiers invite à mettre en relation texte et image, à les confronter ou encore parfois à  les comparer (par exemple : deux gravures, une de Gustave Doré et l’autre de Granville illustrant une même fable). Ainsi, les documents complémentaires fournissent des clés précieuses pour comprendre dans quelle perspective a été construit le corpus, ou pour éclairer un enjeu fort du dossier. Les candidats auront donc tout intérêt à réfléchir à leurs enjeux, en lien avec les textes, et non à les traiter en pièces « annexes ». Trop de lectures d’images se sont souvent révélées décevantes. Rappelons que les documents complémentaires peuvent être le support d’une séance, un prolongement. Il ne peut s’agir, en revanche, d’en faire une lecture analytique et de les confondre avec les textes proposés à l’analyse. 

 

 

  1.       DIX COMMANDEMENTS entre savoirs, savoir-faire et savoir-être

 

  • De la culture avant toute chose : on ne cessera de le répéter, il faut se doter d’une bonne culture des textes et des auteurs, tout autant que des œuvres artistiques majeures. 
  • Analyser : l’exposé sera fondé sur une analyse rigoureuse des textes. 
  • Concevoir et justifier : la recherche d’un juste équilibre : on présentera un exposé à la structure équilibrée, où les partis pris didactiques seront éclairés par les savoirs requis.  
  • De l’analyse au service d’une mise en situation professionnelle : on n’oubliera pas les deux pendants de l’épreuve à visée professionnalisante.  
  • Le sentiment de la langue : on attend in fine une maîtrise de la langue française à deux niveaux : des savoirs maîtrisés dans le cadre didactique proposé, ainsi qu’une parole correcte et précise. On veillera notamment à la précision lexicale.
  • Une posture et une tenue adaptées : on proscrira toute familiarité avec le jury, toute attitude désinvolte à son égard, on ne lui coupera pas la parole, on veillera à une tenue correcte (y compris vestimentaire) en adéquation avec la finalité de recrutement du concours. Courtoisie,  modestie et discrétion sont de mise. 
  • Communiquer : la langue, le corps et la voix. On évitera les appuis au discours (ou « tics » de langage parasites), on regardera  son auditoire, on évitera une lecture intégrale de ses notes, on posera sa voix avec justesse et clarté, on évitera un ton monocorde, on veillera aux liaisons.  
  • Jouer sans sur-jouer : on privilégiera un propos dynamique, sans excès mais engagé, visant l’efficacité à travers notamment la fluidité de la parole, son débit mesuré, sa densité.
  • Etre capable de réagir : lors de l’entretien, on veillera à adopter une posture d’écoute et à montrer des capacités de réactivité et d’engagement face au questionnement du jury.  
  • Etre convaincu pour convaincre : la cohérence de l’exposé et son dynamisme révèleront le plaisir des textes et le goût pour la littérature comme objet à faire vivre et à enseigner.

 

Quelques recommandations…..

Au cours de cette session, les membres des commissions de Littérature et Langue Françaises ont entendu des prestations très variées, d’insuffisantes à brillantes, en passant par convaincantes. Un certain nombre de candidats se sont manifestement préparés avec sérieux et se sont présentés en ayant parfaitement connaissance des exigences de l’épreuve. Cependant, le niveau de préparation des candidats étant très inégal, certains points de formation s’avèrent indispensables à la réussite de l’épreuve. Il s’agira donc pour les futurs candidats d’acquérir ou de consolider les connaissances et compétences suivantes

 

 

 

Renforcer sa culture littéraire en lisant, relisant les œuvres majeures du patrimoine littéraire, sans exclusion, incluant tous les genres, dont les textes d’idées, philosophiques, les textes issus des Langues et Cultures de l’Antiquité et la poésie.

Connaître les préconisations des programmes du collège et du lycée d’enseignement général et s’intéresser à l’épistémologie de la discipline. 

Savoir situer les œuvres et les auteurs dans l’Histoire littéraire. 

Avoir une connaissance fine et précise de l’évolution des genres.

Connaître les  grandes théories littéraires. 

Maîtriser les savoirs didactiques nécessaires pour enseigner : séquence, séance, projet, objectifs...

Renforcer, développer, actualiser, les connaissances grammaticales et stylistiques nécessaires à la lecture et à l’écriture  et en maîtriser la terminologie.

Proscrire le « tout pédagogique » vide de contenu.

S’entraîner, en temps réel, à la mise en œuvre de réelles compétences orales. 

Se projeter dans son futur métier d’enseignant, y réfléchir en amont.  - Lire les précédents rapports de jury et notamment celui de 2014.

 

Conseils de lectures aux futurs candidats : 

 

Les principales lectures recommandées, ouvrages théoriques, littéraires et didactiques, figurent dans le rapport fondateur de la session 201410.  

Nous conseillons également aux futurs candidats, afin d’approfondir leur culture dans la cadre d’une épreuve à dimension comparatiste (définie dans le rapport de 201411), la consultation utile du portail interministériel de l’éducation artistique et culturelle12, du portail disciplinaire d’Histoire des arts,13 ainsi que d’un site dédié aux Langues et Cultures de l’Antiquité.14

 

Nous conclurons ce rapport par une citation de Jean-Michel Maulpoix15 qui, dans une conférence intitulée  Eloge de la lecture 16 a  dit :  

 

« La lecture est une expansion car elle est aussi une traduction. Elle consiste à détailler et interpréter des signes et des scènes, tout comme l’écriture consiste à détailler et interpréter le monde. Lire, c’est donc recouvrer le sens du détail. Et faire ainsi sortir de sa compacité et de son inertie. »

 

L’épreuve de Littérature et Langue Françaises n’a-t-elle pas pour finalité, dans la perspective de la pratique d’un futur métier, de donner le goût et le plaisir des textes, d’inviter à une lecture personnelle, curieuse, féconde, attentive et profonde des œuvres et des auteurs, et de réfléchir aux moyens à ajuster aux fins didactiques proposées afin de transmettre  à des élèves  cette expérience unique des Belles Lettres, de la lecture, de l’écriture et de la  littérature d’une langue  que l’on savoure ?

 

                                                

10   Nous conseillons notamment les références citées pages 183, 184 et 185. 

11   « La nature même des dossiers proposés cette année permet de définir l’épreuve d’ASP/LLF comme une épreuve à dimension comparatiste. Il s’agit bien de saisir la littérature dans le cadre du dialogue qu’elle suscite entre les auteurs, les œuvres et avec d’autres formes  artistiques. » 12 http://www.education.arts.culture.fr/

13   Histoire des arts : http://eduscol.education.fr/histoire-des-arts/

14   Musagora : http://www.cndp.fr/musagora/

15   Poète, critique littéraire,  et professeur d’Université.

16   Texte inédit issu d’une conférence donnée à l’Alliance française de la Vallée d’Aoste.

(http://www.maulpoix.net/elogelecture.htm)

 

 

 

 

 


[1] Que les membres de jury et Présidents des différentes commissions soient ici vivement remerciés pour leur précieuse collaboration.

[2] Rapport        consultable     sur       http://www.education.gouv.fr/cid76921/sujets-des-epreuvesadmissibilite-des-concours-capes-session-2014.html 

[3] Rappelons que l’épreuve de Littérature et Langue Françaises est une épreuve d’analyse de situation professionnelle.

[4] On retrouvera l’ensemble des programmes du collège et du lycée  sur le site Éduscol :

http://eduscol.education.gouv.fr

[5] http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000027361553&dateTe xte=&categorieLien=id

[6] Charte présentée par le ministre le 9 septembre 2013 et téléchargeable sur : http://cache.media.eduscol.education.fr/file/Actu_2015/70/5/2015_charte_laicite_A5x2_NB_ 447705.pdf

[7] Rapport rédigé par Véronique Joubert-Fouillade et disponible en ligne sur Éduscol.

[8] Ministère de L’Education nationale, Programmes de français, préambule 

[9] p.189/270